Subnautica : plongée encyclopédique en classe de français

Subnautica est un jeu de survie sorti en janvier 2018 et développé par Unknown Worlds Entertainment. Après le naufrage de l’Aurora (votre vaisseau spatial) sur une exoplanète complètement immergée, vous devez explorer les fonds marins pour vous procurer des ressources, survivre et vous évader. Le tout, en surveillant vos jauges de soif et de satiété.

Ce jeu offre un immense potentiel d’exploration et le cadre, visuellement magnifique, invite souvent à la contemplation. Toutefois, dangers et prédateurs assurent également un sentiment permanent d’oppression, que renforce d’ailleurs la plongée toujours plus profonde au fil de votre progression.

Dans les abysses de cette planète extraterrestre, la faune et la flore diffèrent complètement de celles que l’on trouve sur Terre. Et c’est ce qui m’a surtout intéressé dans ce choix artistique : bien que fictionnelles, les créatures qui peuplent l’univers de Subnautica partagent de nombreuses analogies avec celles de notre monde. Tel monstre marin ressemble à une pieuvre, tel poisson rappelle un animal aquatique bien connu, etc. Il en est de même pour la flore.

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Quelle utilisation en classe?

Le projet que j’ai proposé à mes élèves de FLE a donc été le suivant : produire le wiki (l’encyclopédie) de l’univers du jeu. Cette séquence s’est étalée sur 6 séances de 50 minutes. Le jeu (acheté via Steam) tournait en continu sur le PC de la classe et était projeté sur le TBI pour que tous puissent suivre la progression. Après une brève présentation du jeu, je leur ai laissé la manette : il leur revenait d’avancer dans la partie entamée en se relayant à chaque fois par deux.

Crabsquid_FaunaPendant qu’une paire d’apprenants jouait, les autres élèves, répartis en groupes, travaillaient sur des parties spécifiques de l’encyclopédie : les animaux marins, la flore marine, et la flore terrestre (ce qui fait donc 3 groupes). Pour chaque entrée de l’encyclopédie (une entrée traite d’un animal ou d’un végétal), les élèves devaient retrouver dans une boîte en carton l’image de la créature (ou de la plante…) identifiée à l’écran. Pour ce faire, j’avais imprimé et découpé chaque élément du jeu que j’avais repris de ce site (à ce propos, la création de wiki à partir d’un jeu est une pratique de joueurs qui m’a inspiré ce projet pédagogique). Pour donner un exemple de situation concrète : Sara regarde Xian et Yassir jouer au jeu. À l’écran, elle voit un crabe-calamar et décide d’en faire une entrée pour l’encyclopédie : elle va fouiller la boite en carton et recherche l’image qui représente la créature avant de rejoindre son groupe de travail pour rédiger la fiche du monstre marin. Elle collera l’image à côté de son texte rédigé. En travaillant ainsi, on assure qu’une même entrée ne soit pas traitée deux fois.

Pour rédiger, il s’agissait de caractériser chaque élément sélectionné avec 5 adjectifs et une brève description. Pour les descriptions, j’avais travaillé juste avant ce projet des structures de phrases comparatives (X ressemble à Y. X est plus … que Y. X est moins … que Y. Etc.) que les élèves pouvaient donc mettre en pratique dans leurs productions.

Sub3Pour établir les comparaisons (les structures grammaticales constituant des squelettes de phrases vides), les élèves avaient besoin d’enrichir leur lexique lié aux champs lexicaux de la flore et de la faune marines. Je souhaitais que cet apprentissage se réalise en autonomie et de manière progressive, en fonction des besoins qu’ils identifiaient en jouant. Du coup, j’avais mis à leur disposition des imagiers. J’ai notamment utilisé le livre 199 animaux marins des éditions Usborne et le guide Faune et flore de la mer Méditerranée (Biotope éditions) que les élèves feuilletaient pour rédiger les entrées de l’encyclopédie. C’était donc à eux d’établir les analogies entre les éléments du jeu et ceux des outils à consulter. Je précise qu’une option offre la possibilité de désactiver la veille des jauges de faim et de soif, ce qui permet de se concentrer uniquement sur l’oxygène et la survie, sans altérer l’expérience du jeu.

À chaque séance de cours, les attributions variaient : ceux qui travaillaient la faune devaient alors se concentrer sur la flore terrestre, etc. Cette tournante permettait de varier les champs lexicaux mobilisés et déplaçait l’attention des élèves-joueurs sur d’autres éléments du jeu.

Une fois une entrée rédigée, les élèves relisaient les productions de leurs camarades avant de venir près de voir pour une correction individuelle. J’aidais ainsi chaque apprenant à améliorer son texte, à corriger les éventuelles erreurs orthographiques ou syntaxiques, avant la mise au net.

Il m’arrivait également, durant les phases de jeu, de poser oralement des questions sur leurs impressions. L’architecture sonore est particulièrement riche; ainsi, leur demander « Qu’est-ce que vous entendez? » permettait de les aider à mettre des mots sur leurs sensations. À certains moments, il était également possible de leur demander ce qu’ils ressentaient, ce qui était l’occasion, par exemple, de travailler le champ lexical de la peur (notamment quand les élèves traversaient des zones particulièrement sombres).

Ce que j’en retire

Pour moi, l’intérêt de réaliser ce projet autour d’un jeu vidéo comme Subnautica est qu’il place les élèves en interaction permanente : avec le jeu (qui leur offre un espace visuel à expérimenter et qui stimule leur réflexion), avec les outils dont ils disposent (les imagiers impliquent que les élèves établissent des rapports d’analogie parfois complexes), entre eux (ils émettent des hypothèses, débattent, se donnent des indications pour progresser dans le jeu, se répartissent des tâches, négocient, se corrigent…) et avec moi (ils viennent faire vérifier leurs textes avant la mise au propre, ce qui me permet de leur rendre un feedback précis et individualisé). De plus, le jeu se prête bien à une posture de contemplation qui permet un arrêt sur image intéressant dans le cadre d’une démarche d’écriture descriptive (notamment pour les animations ou les rapports d’échelle).

Le fait de devoir assurer la survie du personnage tout en réalisant le projet d’écriture ajoute évidemment une charge cognitive à la tâche. Toutefois, loin d’être accablante, cette charge supplémentaire me parait plutôt impulser l’écriture : en effet, retourner régulièrement au jeu permet aux élèves de varier les visuels qui s’affichent à l’écran pour trouver de nouveaux éléments à traiter. Ils ont notamment apprécié pouvoir choisir eux-mêmes ce qu’ils avaient envie d’entrer dans leur encyclopédie (le jeu étant bien trop vaste pour tout rédiger).

Ce qui est également intéressant à noter avec cette configuration, c’est que le projet d’écriture a progressivement intégré l’expérience du jeu (et inversement), si bien que « jouer » et « travailler » s’entrelaçaient et cadraient ici une même activité. L’une de mes craintes était justement que les élèves délaissent le projet d’écriture au profit du jeu, puisque c’est l’une des premières fois où je ne détourne pas complètement en classe un jeu vidéo de ses principaux objectifs.

Par contre, je me suis ici arrêté au format papier. La mise en ligne des productions d’élèves sur un wiki aurait pu être l’occasion de les initier à l’écriture numérique avec, par exemple, les balises d’usage et les spécificités du genre. Par ailleurs, l’exercice peut, à force, sembler répétitif. Si la répétition est nécessaire pour assoir les structures grammaticales travaillées, intégrer des variations ou des challenges permettrait sans doute de varier les postures d’écriture.

Enfin, avec des classes d’un niveau plus avancé, ce jeu permettrait également d’introduire la science-fiction et pourrait stimuler d’autres situations d’écriture (par exemple, rédiger le journal de bord d’un naufragé spatial qui terraforme une planète inconnue). On pourrait également envisager un jeu de rôle où les élèves seraient virtuellement aux côtés de l’avatar, ou leur attribuer une série de missions (découvrir telle espèce animale, fabriquer tel accessoire…) à accomplir dans le jeu à partir d’une fiche de consignes spécifiques.

Jeu vidéo et récit initiatique : une activité autour de Journey

Afin de permettre aux élèves de découvrir la dimension initiatique d’un récit, j’ai utilisé le jeu vidéo Journey (Thatgamecompany, 2012) en classe de français (3è année). Il s’agit d’un jeu contemplatif que j’affectionne particulièrement pour ses qualités artistiques, ainsi que pour sa portée philosophique et symbolique. Le joueur y incarne un être énigmatique, qu’il doit conduire jusqu’au sommet d’une montagne dominant l’horizon. Au fil du voyage et au gré de mystérieuses rencontres, notre avatar découvre le secret de ses origines, les raisons de son périple et le sens de son existence.

Le matériel que j’ai utilisé

Pour cette activité, j’ai emporté ma PlayStation 4 ainsi que le jeu Journey (j’utilise l’édition collector, qui contient aussi les jeux Flow et Flower). Un câble HDMI a permis de relier la PS4 à un TBI dans les locaux où je n’avais pas accès à une télévision. Une connexion Internet est également requise pour profiter de l’expérience de jeu (le mode en ligne permet de croiser d’autres joueurs).

J’ai également construit un dossier de travail (téléchargeable ici) pour les élèves.

Quelle utilisation en classe ?

Premier contact avec le jeu

Il s’agit, d’abord, d’observer l’écran-titre du jeu pour poser les premières hypothèses de sa « lecture ». Nous avons mobilisé ce que nous avons appris dans la séquence sur les langages de l’image pour en construire une analyse formelle. Par exemple, selon mes élèves, la combinaison d’un plan d’ensemble avec la technique du découpage temporel invite le joueur à quitter la dune où il se situe au début du jeu (côté passé) pour se diriger vers l’éclat de lumière à l’horizon (côté futur), qui figure l’objectif à atteindre.

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Un travail de définition autour du mot « périple » permet d’en saisir les nuances et d’en approcher la dimension symbolique (un périple étant un voyage après lequel nous retournons, transformés, au point de départ). Il s’agira donc, durant la partie, d’être attentifs aux marqueurs qui indiquent l’évolution du personnage.

Du jeu à l’analyse croisée

Après l’analyse de l’écran-titre, nous avons joué ensemble à Journey. Les élèves se passaient tour à tour la manette pour se partager l’expérience. Il faut compter 3 à 4 séances de 50 minutes pour terminer le périple (c’est assez rapide).

Les élèves « spectateurs » devaient observer le jeu en rédigeant un carnet de bord du voyage : épousant le point de vue de l’avatar, ils y inscrivaient le récit du périple, immortalisant à l’écrit les sensations éprouvées, les objets découverts, les questions qu’ils se posaient, les difficultés rencontrées, les personnages croisés… Au terme de chaque niveau (7 au total), la mutualisation des carnets de voyage permet d’amorcer une réflexion autour de la portée philosophique du jeu et du sens du récit.

Une fois le jeu terminé, la classe est divisée en 6 groupes. Chaque groupe travaille sur une thématique :

  • « une rencontre » (analyse focalisée sur les personnages),
  • « un récit énigmatique » (analyse focalisée sur l’intertextualité du jeu),
  • « un voyage » (analyse focalisée sur le récit et sa structure).

Chaque groupe dispose d’une batterie de questions pour construire une réflexion autour du jeu, en s’appuyant sur d’autres ressources : chansons, mythes, définitions… Cette phase permet d’apporter aux élèves des clés de lecture qui leur permettront de développer une deuxième lecture de l’œuvre et d’en saisir les spécificités culturelles à côté desquelles ils sont sans doute passés pendant qu’ils jouaient. En effet, un jeu vidéo peut être porteur de significations auxquelles nous n’accédons que si nous possédons un capital de connaissances que nous pouvons activer comme clés de lecture (si la question vous intéresse, je vous invite à consulter mon mémoire).

Dans un premier temps, deux groupes reçoivent la même thématique mais travaillent séparément. Dans un deuxième temps, les groupes ayant travaillé sur la même thématique se réunissent pour partager leurs points de vue et créer une présentation commune,  nuancée, qu’ils communiquent ensuite à la classe sous forme de mini-exposé.

Pour construire ces présentations, chaque « grand groupe » disposait d’un plan de travail qu’il pouvait évidemment modifier selon ses besoins et ses idées. Les exposés ont été l’occasion de connecter des fragments de réflexion autour du jeu pour en décoder progressivement la dimension symbolique et accéder, pas à pas, au sens implicite du récit.

Cet accès à cette nouvelle couche sémantique passe par le prisme de l’interprétation : il faut dès lors veiller à ne pas plier la lecture du jeu à un seul sens qui serait imposé arbitrairement, mais à élargir le cadre d’analyse, à créer du débat. C’est là que réside la richesse de l’activité : le prof guide et impulse la réflexion, mais ne la formate pas. Autrement dit, l’analyse des élèves doit leur permettre de construire eux-mêmes le récit qu’ils se font du jeu.

Formalisation

Après cette étape, les élèves reçoivent une synthèse reprenant les caractéristiques de la dimension initiatique d’un récit. Chaque item de la fiche-outil est illustré par un élément du jeu Journey qui a été mobilisé dans l’analyse des élèves. Les items formalisent plusieurs éléments : structure du récit, thématiques, valeurs et messages véhiculés. Cette formalisation a été pensée pour permettre aux élèves de se construire mentalement une grille de lecture qu’ils pourront ensuite appliquer à d’autres produits culturels.

Réappropriation

Enfin, chaque élève est invité à choisir un produit culturel qu’il affectionne (roman, BD, manga, animé, série, film, jeu vidéo…) et de lui appliquer cette grille de lecture pour en proposer une analyse personnelle. Dans l’idée, le travail réalisé précédemment a donc permis de co-construire des clés de lecture, que les élèves activent ici pour tisser un nouveau discours autour des produits culturels de masse qu’ils consomment au quotidien.

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Synthèse des pistes d’analyse relevées par les élèves

Voici une série de pistes proposées par les élèves au fil de leurs présentations.

Au niveau de la structure du récit

Les niveaux du jeu tissent une métaphore de la vie :

Décors (métaphores)

Sens

Nv 1 Dune Naissance ; l’immensité du monde à explorer s’offre au joueur.
Nv 2 Pont à franchir Représente l’apprentissage. On a le droit de tomber, de se tromper, de recommencer. Il faut retrouver les fragments manquants du pont pour atteindre l’objectif (les trous = les apprentissages manquants).
Nv 3 Désert euphorique L’adolescence et ses premières rencontres ; notre premier amour avec qui on avance comme si on se sentait seul au monde.
Nv 4 La chute Perte de l’enfance, entrée dans le monde adulte, l’impossibilité de revenir en arrière, les obstacles de la vie, la tristesse, la séparation.
Nv 5 Grotte et tour La perte de repères (l’horizon lumineux a disparu), la monotonie, le danger, la dépression (niveau sombre) ; l’importance de pouvoir compter sur les autres pour remonter à la surface.
Nv 6 Pics enneigés La vieillesse, la douleur, la mort, le corps qui s’affaiblit.
Nv 7 Nirvana La mort, l’accomplissement de soi, la recherche d’un ailleurs.

Plus on progresse dans le jeu, plus les niveaux prennent la forme de couloirs qui se resserrent : nos choix sont diminués, les routes que nous pouvons emprunter dans la vie se font moins nombreuses. On ne peut pas revenir en arrière à certains endroits : on est obligé de continuer à avancer, quoi qu’il arrive.

Au niveau de l’analyse des personnages

260px-pieter_bruegel_the_elder_-_the_tower_of_babel_vienna_-_google_art_project_-_editedDans un niveau, nous devons escalader une tour. On peut y repérer une référence au mythe de Babel : interagir avec d’autres joueurs, se comprendre et parler la même langue nous permettent de progresser plus rapidement vers la sortie. Le risque d’échouer est lié à des difficultés de communication, et ces mêmes difficultés peuvent entraîner des luttes de pouvoir divisant les hommes.

En réduisant le langage à sa plus simple expression (une seule commande de chant), le jeu unit les joueurs autour d’un objectif commun : atteindre ensemble l’horizon. La proximité avec un autre joueur et nos interactions avec lui facilitent et rendent plus agréables la progression dans le jeu et l’accès à certains objets cachés. L’émotion, au pic du jeu, est également renforcée : la souffrance de notre avatar est partagée avec celle d’un autre.

Le personnage n’est défini que par quelques traits et demeure le même pour tous les joueurs : peu importe l’origine géographique ou sociale du joueur, il incarne le même avatar que tous les autres (interculturalité). L’absence de bras bannit toute forme de violence possible (on ne peut rien porter).

Plus le personnage explore, plus il a de chances de récupérer des orbes qui agrandissent son écharpe. Celle-ci représente son énergie : plus elle est grande, plus les actions de l’avatar gagnent en souplesse. Explorer le monde nous permet d’accumuler plus de pouvoir que si l’on suivait un chemin tout tracé. À l’inverse du clip La Cerise de Matmatah, le jeu rappelle donc que le sens de la vie se trouve avant tout dans l’expérience que l’on vit plutôt que dans la destination que l’on cherche à tout prix à atteindre.

Au niveau du sens du récit

Progresser dans le jeu nous permet de découvrir des fresques mystérieuses qui représentent visuellement l’histoire des origines de notre personnage. On y voit la naissance de sa civilisation, l’essor de cette dernière, et son déclin. Elles s’assemblent comme un cycle condamné à être rejoué. D’ailleurs, à la fin du jeu, le générique fait parcourir l’âme de notre avatar en sens inverse, pour le ramener à son point de départ. Il est alors condamné à rejouer le même parcours, à revivre son histoire, à réapprendre son passé. Mais quelque chose a changé chez lui : à présent, il est devenu un passeur de savoir.

On peut enfin lire dans le jeu un certain message écologique : les « dragons » que l’on rencontre représentent des machines (industrialisation) qui ont détruit la civilisation (les personnages sont sous terre, en position horizontale qui évoque leur mort). Dans les fresques que l’on découvre au fil du jeu, ces dragons s’assemblent d’ailleurs pour former une sorte de ville écrasant leur civilisation.

Gaël

Une partie de TowerFall pour travailler les adverbes

Récemment, j’ai utilisé le jeu TowerFall en cours de français (deuxième année). L’idée m’est venue en regardant les vidéos Youtube d’un élève qui commente et arbitre des compétitions du card game Hearstone (Blizzard, 2014).

Présentation

Je cherchais justement un moyen de travailler de manière ludique – mais intelligente – les adverbes de manière (ex : peureusement, rageusement, gentiment…). Je souhaitais surtout que cet apprentissage fasse sens aux élèves, sans tomber dans une approche trop académique ou trop artificielle. Mon choix s’est tourné vers TowerFall pour trois raisons : 1) c’est un jeu que j’apprécie énormément et que je trouve fun à jouer ; 2) les parties sont simples, rapides et facilement personnalisables ; 3) il propose un cadre de jeu qui m’a permis de me réapproprier facilement les pratiques de mon commentateur e-sportif.

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Pour info, Towerfall Ascension (14,99 euros sur Steam) est un jeu de combat en 2D, sorti en 2013 et développé par Matt Thorson. Tout en pixel art, il propose des combats en arène dans une ambiance médiévale : jusqu’à 4 joueurs peuvent s’affronter ou faire équipe contre des vagues de monstres. Les commandes sont très simples et intuitives : on se déplace avec les touches multidirectionnelles (ou un joystick si vous jouez avec une manette), on saute avec une autre touche et on tire des flèches à l’aide d’une dernière. That’s all ! Une extension, Dark World, est sortie en 2015 et ajoute du contenu supplémentaire.

Le matériel que j’ai utilisé

Pour cette activité, j’ai simplement emporté  mon MacBook et une manette PlayStation 4 supplémentaire pour permettre à deux élèves de s’affronter. J’avais déjà acheté le jeu en dématérialisé sur Steam. Une petite enceinte que j’ai toujours avec moi (une Rockbox Cube) m’a permis de renforcer le son pour le côté immersif.

Quelle utilisation en classe ?

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L’idée est la suivante : la classe est divisée en 3 groupes de travail : les joueurs (2 élèves), les arbitres (2) et le public (9). C’est une petite classe : pour un plus grand groupe, il me semble qu’on peut prévoir jusqu’à 4 joueurs et 4 arbitres.

J’explique d’abord brièvement les règles du jeu en jouant une partie avec un élève. Une fois les mécaniques bien comprises, je donne les consignes de travail puis tout le monde se met au boulot.

On fonctionne par « tours ». À chaque tour, deux joueurs s’affrontent à TowerFall pendant que deux arbitres commentent oralement et en direct la partie. Pour les arbitres, le challenge est d’employer le plus d’adverbes de manière possible pour donner au match un caractère épique (les champs lexicaux des armes et du combat ont été vus précédemment dans ma séquence sur le registre épique). Pendant ce temps, le public doit noter tous les adverbes entendus.

Lorsque la partie est terminée, on comptabilise les différents adverbes employés par les commentateurs. S’ils ont employé un même adverbe à plusieurs reprises, ils sont invités à aller rechercher des synonymes dans un dictionnaire. Lorsqu’ils joueront une nouvelle partie, le défi consistera à employer les synonymes découverts.

Pendant que les arbitres recherchent des synonymes, le public vérifie l’orthographe des adverbes qu’ils ont recopiés en utilisant les référents à leur disposition : des dictionnaires et le cours. Durant les tours suivants, les membres du public peuvent aussi aider les joueurs à trouver des synonymes en consultant ceux qu’ils ont notés lors des tours précédents. C’est aussi l’occasion de varier les registres de langue des adverbes employés.

À la fin de chaque tour, les joueurs deviennent arbitres, les arbitres rejoignent le public et deux membres du public deviennent les joueurs. Chacun expérimente ainsi différents rôles et opèrent plusieurs apprentissages. Pour consolider ces derniers, chaque élève devrait dans l’idéal avoir arbitré plusieurs fois.

Feedback

Cette séquence de cours présente selon moi plusieurs avantages : outre le caractère motivant évident de l’utilisation d’un jeu vidéo, l’emploi des adverbes de manière est cadré par une activité (le jeu et son arbitrage) qui fait sens (souligner et construire un registre épique) et qui permet d’expérimenter les nouveaux mots appris.

Une dynamique de collaboration est générée par les interactions des élèves puisque le public renvoie directement aux arbitres un feedback qui se formalise à travers un objectif de remédiation, de consolidation ou de dépassement à atteindre la prochaine fois (utiliser de nouveaux adverbes).

Puisque le groupe s’autogère (chaque élève passant d’un rôle à l’autre en appliquant les consignes simples, qui ont été expliquées), je peux aider les élèves à la correction de l’orthographe et à la vérification du sens des adverbes. C’est aussi l’occasion de donner quelques astuces pour améliorer l’expression orale.

En variant les rôles, les élèves passent par différentes postures de travail : identification à l’écoute des adverbes, mémorisation lexicale et orthographique à l’écrit, expérimentation à l’oral.

Toutefois, le dispositif mérite d’être amélioré sur certains points : il manque, par exemple, une posture de travail dans laquelle les élèves pourraient reconfigurer leurs apprentissages dans une tâche de réinvestissement. On pourrait par exemple penser à faire enrichir un extrait de texte en rendant ce dernier plus épique à l’aide des adverbes travaillés dans la séquence. Cette étape permettrait d’opérer un transfert d’un contexte d’oralité vers un contexte d’écriture.

Enfin, il me semble que cette activité pourrait être facilement transposable dans une classe de langues. N’hésitez pas à partager vos avis et vos suggestions pour m’aider à améliorer le dispositif.

Gaël